2016/03/22

L’étrange cas de l'Union Jack et de Mister Hide: le lent déclin de l’hégémonie financière londonienne

L'article original a été publié par le
Centre de Recherche sur la Mondialisation
Après les Etats-Unis depuis 2008, l’attention mondiale s’est également portée depuis 18 mois sur la crise représentée par la Turquie et l’Arabie Saoudite dans le conflit international contre Daesh. Nous ne parlons pas ici de l’attention des experts, mais de l’audience mondiale au-devant de qui les rideaux tombent les uns après les autres dans les articles des journaux grand public, dévoilant successivement des pans entiers d’une réalité masquée depuis bien longtemps.
Trois autres pays font régulièrement la une, trois pays étroitement liés aux précédents : Israël avec le conflit Palestinien, ainsi que la Corée du Nord et ses relations menaçantes [1] avec les pays voisins. Le troisième pays est le Royaume-Uni et ses relations avec l’UE. Les menaces et enjeux du Brexit ont déjà été longuement détaillés.[2] Ce présent article est consacré à l’anticipation d’une autre fracture dans ce pays, révélatrice d’un autre pan de la réalité : la fracture entre la City de Londres et le reste du Royaume-Uni.
Ne nous y trompons pas : la City est l’un des objets sociaux-historiques les plus complexes à étudier. La relation de puissance qu’entretient la City a besoin d’être expliquée, décortiquée. En effet, on ne peut pas dire qu’une relation perd de la puissance si on n’explique pas quelles sont cette relation et cette puissance au départ et d’où elles proviennent historiquement, sinon la démarche tourne à vide.
Nos précédents travaux ont permis de montrer que l’histoire de l’Occident est orientée depuis le XVIIème siècle par trois mouvements de fond entrelacés :
  • l’émergence des organisations des Etats profonds et de leurs relations transnationales secrètes [3]
  • le développement des structures de la finance internationale et des banques centrales [4]
  • le développement de mouvements politico-religieux hérétiques visant depuis les XVIIème et XVIIIème siècles à renverser l’ordre établi, comme le Sabbataïsme et le Wahhabisme déstabilisant l’Empire Ottoman, ou comme les agissements de Daesh de nos jours.[5]
Ces trois mouvements de fond ont forgé l’âme profonde de la City de Londres, dont l’influence s’est développée d’une manière schizophrénique vis à vis de l’état public et visible du Royaume-Uni. À l’image du personnage du célèbre roman de Stevenson, le Royaume britannique est en réalité gouverné d’une part par l’état monarchique visible (désigné par l'Union Jack dans notre titre, et qui prend le rôle du Dr Jekyll) et d’autre part par l'élite de la City, qui est sa partie profonde, son Mister Hide, celui qui cache.

Un Royaume à deux états

La nature juridique de la City de Londres est très particulière. Elle se distingue des 32 autres districts londoniens par un statut sui generis lui conférant à la fois le titre de « Cité » et de comté cérémoniel, dont le mode d’administration est unique.
C’est en 1319 qu’une charte signée par Édouard II consacre l’autonomie de la City et le rôle prépondérant des guildes (devenues plus tard les « vénérables compagnies ») dans son administration.[6]
Le Lord-maire [7] de la City qui incarne les libertés acquises par les bourgeois, est élu traditionnellement chaque année le 29 septembre. Le deuxième samedi de novembre, celui-ci doit se rendre en très grande pompe au palais de Westminster pour recevoir, par l’intermédiaire du Lord Chancelier [8], l’agrément du souverain britannique.
Investi de sa charge, le Lord-maire est le président de la City of London Corporation, qui est à la fois un conseil d’administration et un conseil municipal. Il a notamment la responsabilité de son propre corps de police, la City of London Police.[9] La City est la seule circonscription administrative de Londres qui ne soit pas sous la juridiction par la Metropolitan Police. Il fait partie du conseil qui proclame un nouveau souverain britannique.[10]
Le Lord-maire exerce également une fonction judiciaire, puisque tous les délits commis dans la Cité sont relevables de sa juridiction. Il est président du tribunal.
La City dispose d’un remémoreur qui est un fonctionnaire désigné pour défendre les intérêts de la City de Londres au parlement britannique. Le Lord-maire reçoit officiellement des ministres des affaires étrangères d’autres états, et se déplace à l’étranger pour promouvoir les intérêts de la City. À la fois les entreprises et les résidents de la City portent la responsabilité de supporter l’industrie des services financiers et de représenter ses intérêts. Elle comporte aujourd’hui 8000 résidents mais 50 fois plus de personnes viennent y travailler tous les jours.
La gouvernance de la City n’a pas été modifiée par le Municipal Reform Act de 1835. Une tentative a eue lieu en 1894 pour supprimer la distinction entre la City et le reste de Londres, menée par la Royal Commission on the Amalgamation of the City and County of London, mais un prompt changement de gouvernement à Westminster a eu pour conséquence l’abandon de ce projet.
La City est donc juridiquement un véritable État dans le Royaume britannique.

La City, bras séculier de l’Empire britannique

À la fin du XVIème siècle, Londres devient progressivement un centre majeur pour les activités de banque et de commerce international.
Le Royal Exchange est fondé en 1565 par Sir Thomas Gresham en tant que centre pour les commerçants de Londres, et il obtint le patronage Royal en 1571.
La société East India Company reçut une Charte Royale de la Reine Elizabeth I le 31 December 1600. Les parts étaient détenues par de riches marchands et des aristocrates.
Fondée en 1694 au cœur de la City par des commerçants orfèvres, la banque d’Angleterre est la deuxième plus vieille banque centrale du monde, et la huitième plus vieille banque. Elle a été fondée pour être le banquier du gouvernement anglais. La Banque est sous statut privé de 1694 jusqu’à sa nationalisation en 1946. En 1998 elle devient une organisation publique indépendante, possédée par le Treasury Solicitor pour le compte du gouvernement.
La Banque d’Angleterre a institutionnalisé les réserves fractionnaires. William Paterson, son fondateur, est célèbre pour avoir déclaré : « la Banque reçoit les intérêts de toutes les sommes qu’elle crée à partir de rien. »[11]
Le XVIIIème siècle est une période de croissance rapide pour Londres, reflétant une population grandissante, les premiers effets de la Révolution Industrielle et le rôle de Londres comme centre de l’Empire Britannique.
La East India Company a gouverné une large part de l’Inde et du Bangladesh avec ses propres armées privées, y exerçant à la fois les fonctions militaires et administratives, à partir de 1757 après la bataille de Plassey. Lors de la Grande Famine du Bengale de 1770, environ 10 millions de personnes, soit un tiers environ de la population de cette région, meurent.[12] La famine a été causée par une monoculture de l’opium à la place de culture vivrières. Cette monoculture a été forcée par la East India Company pour l’exporter vers la Chine comme stratégie d’affaiblissement de l’Empire Chinois, menant aux guerres de l’Opium quelques années plus tard.[13]
En 1858 la Couronne Britannique nationalise la East India Company et assume directement le contrôle de l’Inde.

La City hérite de la finance internationale

Il est impossible de comprendre la puissance financière et politique de la City sans mentionner l’histoire de la famille Rothschild. Remontons quelques décennies en arrière sur le continent : Samuel Wolf Oppenheimer (1630-1703) reçut la charge de juif de cour (court jew c’est-à-dire financier, changeur de monnaie et commerçant en import export) à la cour de l’Empereur Leopold I d’Autriche. Son fils Simon Wolf Oppenheimer exerça la même fonction à la cour de Hanovre.
Jacob Simon Wolf Oppenheimer, le petit-fils de Samuel Oppenheimer, a enseigné à son apprenti Mayer Amschel Rothschild (né Meyer ou Meier Anschel Bauer)[14] les arcanes du commerce international et du change de monnaie à Hanovre entre 1757 et 1763.[15] C’est à Hanovre qu’il conduisit les premières affaires avec le Lieutenant-Général Baron von Estorff, au départ intéressé par ses connaissances de numismate. Son père Moses Amschel Bauer était déjà à Francfort préteur sur gage et changeur de monnaie. Il reprit l’affaire familiale en 1763 en l’étendant aux services financiers, au moment où von Estorff pris la charge de conseiller auprès du souverain (Landgrave) Friedrich II von Hessen-Kassel, l’un des hommes les plus riches d’Europe. Sa fortune était évaluée entre 70 et 100 millions de florins, la plupart hérités de son père Wilhelm VIII, frère du Roi de Suède.
Le Baron von Estorff recommanda au Landgrave les services de Mayer Amschel. Il obtint le titre de juif de cour en 1769.
Mayer Amschel eu ensuite l’occasion de servir d’intermédiaire financier avec le Baron von Estorff lors de l’envoi en Amérique du contingent de mercenaires Hessiens pour le service du roi anglais en 1775-76.[16] Le Landgrave de Hesse gagna 22 millions de thalers dans cette opération.[17]
Il gagna le patronage de Friedrich II von Hessen-Kassel, puis ensuite le patronage du Prince Héritier Wilhelm von Hessen qui avait le même âge que lui et auprès de qui il avait une forte influence. Après la mort subite de Friedrich II le 31 Octobre 1785 à l’âge de 65 ans,[17b] Wilhelm devint Wilhelm IX von Hessen-Kassel, et prend ensuite le nom de Wilhelm I prince-électeur de Hessen après 1805. En 1806 Mayer lui permet de mettre à l’abri son trésor lors de l’invasion de la Hessen-Kassel par les armées napoléoniennes. Napoléon voulait stopper ce trafic de mercenaires qui s’était étendu avec la Prusse.[18]
Mayer Amschel redonnant son trésor au prince-électeur de Hesse, après son retour d’exil [19]
Envoyé par son père Mayer Amschel en Angleterre en 1798, le jeune Nathan Mayer Rothschild (1777 – 1836) commença à faire fortune dans le commerce du textile anglais, un produit de grande qualité et de renommée internationale à l’époque à tel point que cette guilde est encore aujourd’hui la première dans l’ordre de préséance à la City, puis des services financiers à partir de 1805 en liaison avec son père à Francfort. Nathan Mayer joua un rôle très important au moment des guerres napoléoniennes en permettant aux armées anglaises en campagne de financer (moyennant intérêts) leurs dépenses grâce à l’or de sa famille. Il investit dans les obligations d’État britannique, en spéculant à la hausse. C’est à ce moment-là qu’il devint un partenaire indispensable de la couronne britannique. En 1814, il avait avancé 1,2 million de livres au gouvernement anglais. Lors du retour surprise de Napoléon pour les Cent-Jours en 1815, il fut capable de fournir 9,5 millions de livres aux armées coalisées.[20] Son père puis ses 4 frères avaient fondé des banques dans les 4 autres pays les plus puissants en Europe, ce qui permettait à la famille d’être constamment dans le camp des vainqueurs des différents conflits, s’assurant que leurs prêts aux souverains seraient remboursés.
Selon une affirmation très répandue dès le XIXème siècle,[21] son plus grand coup financier, basé sur un délit d’initié, se serait produit lors de la bataille de Waterloo en juin 1815 dont il connut l’issue deux jours avant l’opinion publique anglaise grâce à son important réseau de messagers en Europe qui lui avait valu de gagner un contrat avec l’armée de Wellington.[22] Vrai ou pas, quand il revendit ses obligations d’Etat en 1817, elles avaient fortement grimpé. En 1818, les Rothschild fondent de fait le marché obligataire international en lançant un emprunt en devises pour la Prusse.[22b]
Cette fortune permis à Nathan Mayer Rothschild de gagner une position d’une telle puissance à la City qu’en 1825–1826 il fut capable de prêter suffisamment d’or à la Banque d’Angleterre pour interrompre une crise de liquidités. Il devint ainsi le préteur en dernier ressort et maître incontesté de la City. Ce micro-état souverain avait désormais officieusement à sa tête une dynastie impériale, maîtresse d’une fortune colossale.
Nathan Mayer Rothschild était le pilier de la place financière de Londres, alors très portée sur le financement de la croissance aux Etats-Unis: les banques anglaises refinançaient en particulier les crédits de la multitude de banques américaines créées dans les années 1830.
À partir de ce moment l’influence de la City sur les Etats-Unis ira sans cesse croissante, mais toujours de manière profonde, dans l’univers feutré de la finance internationale.
En 2005, Mayer Anschel Rothschild fut classé 7ème dans la « Liste des hommes d’affaires les plus influents de l’histoire » par Forbes, le nommant « père de la finance internationale ».
Lors de sa mort en 1836, la fortune personnelle nette officielle de Nathan Rothschild est évaluée à 0,62% de l’ensemble du revenu national britannique, c’est-à-dire 3,22 millions de livres de 1836, soit l’équivalent du pouvoir d’achat de 370 millions de livres sterling en 2016.[23] Il est alors intéressant de se poser la question suivante : où est passée cette fortune aujourd’hui, sachant que les avoirs actuels officiels cumulés de la famille Rothschild [24] semblent bien loin d’atteindre cette somme quand on inclut simplement les intérêts composés[25], sans compter les fortunes accumulées par les autres branches de la famille ni les autres investissements ? [26]
En 1858 après une lutte d’influence de 11 ans, Lionel Nathan Rothschild devint le premier parlementaire qui siège sans prêter le serment chrétien. En 1875, Lionel de Rothschild finance en secret la part de l’État britannique dans le Canal de Suez.[22b] En 1869 Alfred de Rothschild, fils de Lionel, devint directeur à la Bank of England. En 1885 son frère Nathan Mayer devint Lord. En 1919, Rothschild est nommé à la tête du comité chargé de fixer le cours quotidien mondial de l’or à Londres.[22b]
En 1838, l’américain Georges Peabody démarre une société de trading à Londres. Elle deviendra en 1851 la première société américaine à Londres. En 1854 il prend l’américain J.S. Morgan (le père du célèbre J.P. Morgan) comme associé. Durant la crise bancaire de 1857, Peabody arrive à obtenir un prêt de 800 000 livres de la Banque d’Angleterre, évite grâce à cela la faillite et s'enrichit en rachetant  des valeurs en déroute. J.P. Morgan fait ses premières armes à Londres en 1857 dans cette société avant d’en hériter et de repartir aux USA. Il jouera un rôle déterminant à Wall Street, dans des prêts importants lors de la guerre franco-prussienne de 1871 et dans la création de la Banque Fédérale des Etats-Unis en 1913.[27] JPMorgan est aujourd’hui la 4ème entreprise du monde tous secteurs confondus.[28] 
Dans son livre paru en 1932, Rutherford citait une lettre des frères Rothschild :
“A Mr. John Sherman has written us from a town in Ohio, U.S.A., as to the profits that may be made in the National Banking business under a recent act of your Congress, a copy of which act [NDR: National Bank Act of 1863] accompanied his letter. Apparently this act has been drawn upon the plan formulated here last summer by the British Bankers’ Association and by that Association recommended to our American friends as one that if enacted into law, would prove highly profitable to the banking fraternity throughout the world.
Mr. Sherman declares that there has never before been such an opportunity for capitalists to accumulate money, as that presented by this act and that the old plan, of State Banks is so unpopular, that the new scheme will, by mere contrast, be most favorably regarded, notwithstanding the fact that it gives the National Banks an almost absolute control of the National finances. “The few who can understand the system,” he says, “will either be so interested in its profits, or so dependent on its favors, that there will be no opposition from that class, while on the other hand, the great body of the people, mentally incapable of comprehending the tremendous advantages that capital derives from the system, will bear its burdens without complaint, and perhaps without even suspecting that the system is inimical to their interests.
Please advise us fully as to this matter, and also, state whether or not you will be of assistance to us, if we conclude to establish a National Bank in the City of New York.” [29]
On peut raisonnablement penser à la suite des travaux du professeur Quigley [30] qu’une grande partie de Wall Street s’est retrouvée contrôlée par la City, et qu’en conséquence, que les Etats-Unis sont en quelque sorte redevenus en termes de souveraineté réelle un territoire parmi d’autres dans le CommonWealth britannique. Voilà pour la fameuse « relation spéciale » depuis 1945. C’est pourquoi l’influence de Wall Street sur la politique des Etats-Unis ne reflète pas l’intérêt national américain. Il est justifié de prendre en considération l’idée que les USA, gangrenés par leur Etat Profond et ses ramifications transnationales, auront finalement joué à l’insu de leur plein gré un rôle de super bras séculier depuis la fin des années 30, évitant à la City et à l’armée britannique de s’exposer davantage.

L'Union Jack et Mister Hide

Aujourd’hui, la City représente 1,4 % des emplois du Royaume-Uni, et officiellement 3 % du revenu national brut (soit 64 milliards de dollar en 2014) ainsi que 21 % des recettes fiscales du Royaume-Uni.[31]
L’influence politique de la City sur le gouvernement anglais ne fait guère de doute, à l’image de celle de Wall Street sur Washington.
Il est normal à ce stade de se poser la question de l’influence de la City sur la famille Royale elle-même.
Victoria montre sur le trône britannique en 1837. Victoria [32] épouse en février 1840 son cousin Albert de Saxe-Cobourg-Gotha. En 1901, lorsque Édouard VII, fils de la reine Victoria, monte sur le trône, il porte le nom de son père et la maison royale prend dès lors le nom de Saxe-Cobourg. En 1917 il renomme sa maison de Saxe-Cobourg en Windsor. On retrouve donc à partir de 1837 une trace de l’influence saxonne et de sa culture profonde au sommet de la dynastie régnante. À titre d’exemple de dévoilement, les liens de la famille royale britannique avec Hitler entre les deux guerres mondiales resurgissent actuellement.[33]
Parvenue au faîte de leur puissance, la crise financière depuis 2007 a ouvert en grand le flux d’or vers l’Asie ce qui a signalé le tarissement du Pactole, la source des finances de la City. Les tribulations et scandales du fixing de l'or et de l'argent à Londres depuis 2003 en sont un autre indicateur. 
Source : Bullion Star, 8/03/2016
La vraie nature de Mister Hide commence à être mieux connue des citoyens du Royaume-Uni, en particulier depuis les révélations sur les fraudes fiscales planétaires (voir par exemple le livre de Nicholas Shaxson), puis celles d’Edward Snowden sur les noirs agissements du GCHQ.[34] Dès les années 1990 les liens privilégiés à Londres entre Al-Qaïda et l’état profond anglais étaient déjà affublés du sobriquet de Londonistan.
Il est déjà de notoriété publique que derrière le paravent du Commonwealth les Dépendances de la Couronne et les British Overseas Territories de Sa Majesté rassemblent le quart de tous les paradis fiscaux du monde.[35] Des organisations non gouvernementales anglaises luttent contre cette emprise [36], l’une d’entre elles écrivant : « The City effectively now stands as money launderer of the world, the capital of global crime. »[37] Cet écart toujours grandissant entre la City et le reste du Royaume-Uni fait l’objet de recherches de la part d’auteurs et d’artistes qui alimentent cette prise de conscience.[38] Malgré tout, le statut de la City elle-même reste incontesté. Nous en voulons pour preuve l’initiative internationale d’échanges automatiques d’informations fiscales pour lutter contre la fraude et le blanchiment, décidée par le G20, et mise en œuvre au travers de l’AEIO,[39] un nouveau standard de l’OCDE. La mise en opération de ce standard sera effectuée en 2017 et 2018 par les autorités fiscales de 97 juridictions officiellement déclarées à ce jour. La liste est pertinente puisqu’on y trouve des juridictions comme Andorre, Anguilla, Antigua, Aruba, Bahamas, Barbades, Bermudes, Iles Vierges Britanniques, Brunei, Cayman, Iles Cook, Curaçao, Chypre, Gibraltar, Grenade, Hong-Kong, Guernsey, Ile de Man, Jersey, Liechtenstein, Sainte Lucie, Macao, Iles Marshall, Monaco, Montserrat, Niue, Saint Kitts, Saint Martin, Saint Vincent, San Marin, Trinidad, Iles Turks, et UK. Mais nulle trace de la City qui n’a pas signé cet accord ! Alors que son indépendance vis à vis du Royaume-Uni est très grande voire totale, c’est dans les faits un état invisible, un spectre qui n’apparaît dans aucun traité depuis plus d’un siècle.
Comment stopper les agissements schizophrènes de Mister Hide sans mettre en même temps la royauté de l'Union Jack sous les verrous ? [39b] Le Financial Times décrit parfaitement la situation qui prévaut désormais :
The crash and the subsequent depression broke the confidence of a generation of political leaders. All the guff they had learnt about a new financial capitalism, self-equilibrating markets and the end of boom and bust was shown to be, well, guff. Seven years on, bankers are once again clinking champagne glasses. By and large, they got off scot free. Not so politicians who believed their own propaganda and embraced the laissez faire Washington Consensus as the end of history. Capitalism survived the crash, but at the expense of a collapse of trust in ruling elites”.[40]
Ce déclin de la City est visible de manière éclatante dans l’abandon forcé de sa relation spéciale avec les US en mars 2015 pour rejoindre l’AIIB, pièce fondatrice de la nouvelle architecture financière mondiale. Cette révolution diplomatique se traduit ensuite par une visite historique en grande pompe du chef d’état chinois pendant 3 jours à Buckingham Palace, pendant laquelle il annonça une nouvelle « ère d’or » entre la Chine et le Royaume-Uni.[41] Faisons confiance aux chinois pour dîner avec le diable avec une cuillère suffisamment longue. Le souvenir des guerres de l’Opium et de la destruction de l’Empire chinois reste très vivace parmi ce peuple.
Comme tout Empire en phase de contraction, le résidu de puissance impériale se tourne vers la lutte sur sa frontière intérieure. Juste après avoir gagné l’élection générale fin 2015 David Cameron a ainsi déclaré : “For too long, we have been a passively tolerant society, saying to our citizens: as long as you obey the law, we will leave you alone. It’s often meant we have stood neutral between different values. And that’s helped foster a narrative of extremism and grievance. This Government will conclusively turn the page on this failed approach.” Au lieu de rassurer, ce discours a immédiatement été perçu par l’opinion publique du Royaume-Uni comme étant une menace directe envers les lois sur les libertés civiles et l’ouverture du dialogue démocratique.[42]
Notre anticipation est que le dévoilement de l’influence réelle de Mister Hide sur le Royaume-Uni et au-delà n’en est qu’au début. Ce dévoilement concernera l’ensemble des facteurs profonds que nous avons mentionnés, en s’étalant sur plus de 10 ans. À court terme ce n’est pas pour autant la fin de la City mais sa baisse de puissance que nous anticipons. Ce dévoilement sera à la mesure de l’influence réelle de la City, c’est à dire planétaire.
La crise systémique globale, l’émergence de nouvelles places financières de tout premier plan (par exemple Shanghai et son marché de l’or), la marginalisation politique du Royaume-Uni au sein de l’UE, le renforcement de la zone Euro… tout cela a commencé à diminuer l’influence de la City qui ne retrouvera pas sa puissance d’antan car la roue tourne. C’est l’histoire d’un Empire en déclin après avoir fait la guerre à plus de 125 peuples depuis sa fondation en 1707.[43]
Dr Bruno Paul 

À propos de l’auteur :
Le Dr Bruno Paul est le fondateur et directeur des études de Conscience-Sociale.org, un producteur culturel autonome pratiquant la transdisciplinarité créé en 2008.
Il s’agit d’abord de contribuer à éclairer le sens à toutes les échelles de décision, du citoyen jusqu’aux parties prenantes dans les relations internationales. Voici notre manifeste.


[1] Lire à ce sujet : NKNews, 01/2016
[2] Global Europe Anticipation Bulletin, n 102, 02/2016
[3] Pour la définition précise et l’origine de ce terme en sciences politiques, voir Conscience Sociale, 03/2014 ; Ces liens historiques mettent également en évidence que des acteurs de l’Etat Profond ont enraciné leur influence non seulement en Turquie et aux USA (et ses pays satellites traditionnels en Asie comme le Japon, la Corée du Sud ou les Philippines), mais aussi au Canada, en Angleterre, en Allemagne (voir iciici et ici), en Italie, en France, en Egypte, en Arabie Saoudite, en Inde , en Thaïlande
[4] Conscience Sociale, 03/2015
[5] La philosophie morale de l’Ancien Testament est en lutte contre l’anti-morale qui a culminé avec Sabbataï Tzvi et les Sabbataïstes, dont le mouvement s’est historiquement prolongé avec les Dönmeh et les Frankistes. Le dénouement de la crise actuelle marquera également, selon nous, l’échec de ce détournement antinomique de la morale que l’on reconnaît par la formule de Tzvi « C’est en violant la Torah qu’on l’accomplit ». Pour aller plus loin sur ces concepts méta historiques, lire Conscience Sociale, 10/2014.
[6] Depuis cette époque, l’organisation municipale de la City gravite toujours autour de la Corporation de la City de Londres comprenant le Lord-maire (Lord Mayor), les 25 échevins (le Court of Aldermen) élus à vie à raison d’un par quartier (ward) et des 150 conseillers (le Court of Common Council) élus annuellement représentant les 110 vénérables compagnies répertoriées dans la City. Ne sont éligibles à ces conseils que des résidents déclarés Hommes Libres de la City de Londres. La City of London Corporation est probablement l’autorité de gouvernement local élue de manière continue la plus ancienne au monde.
[7] Terme apparaissant dès 1414 et devenant usuel après 1545.
[8] Le Lord Chancelier est un membre du Cabinet, responsable du bon fonctionnement et de l’indépendance des tribunaux.
[9] Ainsi que des écoles, des marchés et de la voirie de la Cité, des services d’hygiène du port et des ponts franchissant la Tamise au niveau de son territoire.
[10] Il a également la particularité d’octroyer au monarque britannique la permission ou non de pénétrer sur sa juridiction, en lui remettant solennellement son épée.
[11]  Avec les monnaies fiduciaires, les banques centrales font encore mieux comme accumulation d’intérêts sans effort : voir The Guardian, 03/2014 ; Global Research, 02/2013. À ce sujet on était prévenu depuis des siècles : “If ever again our nation stumbles upon unfunded paper, it shall surely be like death to our body politic. This country will crash.” – George Washington, (1732-1799). “A theft of greater magnitude and still more ruinous, is the making of paper money; it is greater because in this money there is absolutely no real value; it is more ruinous because by its gradual depreciation during the time of its existence, it produces the effect which would be proration of the coins. All those iniquities are founded on the false idea the money is but a sign.” – Destutt de Tracy, (1754-1836)
[12]  La politique de Churchill en 1943 causera la deuxième grande famine dans ce pays.
[13] Toutes ressemblances avec des situations contemporaines où l’Afghanistan et la Colombie remplacent le Bengale ne sont pas des coïncidences. Voir P.D. Scott, La Machine de guerre américaine – La politique profonde, la CIA, la drogue, l’Afghanistan, Rowman & Littlefield Publishers (2010, english), Ed. Demi Lune (2012, français)
[14] Il est intéressant de noter que « destiné par ses parents à devenir rabbin, il fut envoyé à Fürth [NDR: à 220 km de Francfort] pour y suivre un cours de théologie juive, mais la vocation lui faisait défaut. » ; source : La revue des deux Mondes, tome 87 (1888). Sur l'origine du nom Rothschild on consultera A. Elon, Founder: A Portrait of the First Rothschild and His Time, chapitre 1 (1996)
[14b] On pourra consulter cette compilation des banquiers juifs célèbres

[15]  Site officiel de la famille Rothschild
[16] Site officiel de la famille Rothschild ; R. Atwood, The Hessians – Mercenaries from Hessen-Kassel in the American Revolution (2002). On peut lire page 36 : « To the British, speed was essential in concluding the treaty with Hessen. They granted the Landgraf numerous favourable terms, including back-dating the subsidy to 15 January, in order that he should set his corps in motion as quickly as possible. »
[17]  La revue des deux Mondes, tome 87 (1888)

[17b] On remarque que Jacob Frank (généalogie) s'est installé au Isenburger Schloss à Offenbach en 1786, à un peu plus de 6 km du ghetto juif de Francfort où habitait la famille des banquiers Rothschild. Il y décède en 1791, et sa fille Ewa en 1816. Pour aller plus loin lire cet article et la bibliographie rassemblée en annexe. Jacob Emden a mentionné dans son autobiographie chapitre XII le fort militantisme sabbataïste de 'Jacob Rothschild' (lequel? peut-être Jacob Lewin Rothschild ou Jakob Rothschild-Bauer ou Jacob Rothschild), disciple de Eibeschuetz  à Altona en 1755
source
La famille des banquiers Rothschild est également mentionnée en tant que financier d'Ewa Frank dans les mémoires de Moses Porges (1781-1870), second fils de Morenu Raw Gabriel Porges de Prague, rédigées vers la fin de sa vie:
"Cette année-là [1798], M. Salomon Zerkowitz vint aussi à Offenbach. Il avait été très riche et il apportait avec lui tout ce qui restait de sa fortune, qu'on lui ordonna d'abandonner. Sa richesse consistait en titres du gouvernement autrichien que je portai à Francfort pour que le vieux Rothschild les change en argent." (Arthur Mandel, Le Messie Militant ou la Fuite du Ghetto, (Archè, 1989) Pp. 260)
Autres généalogies sabbataïstes ou frankistes: Mendel Speyer (1, ou 2), Juspa Joseph Levy Manzpach Holländer, Carl Anton (Moshe Gershon Cohen), von Hönigsberg, von Hönigstein, von Hönighof, von Henitstein, von Bienefeld : les cinq familles représentant les cinq enfants de Löbl Hönig, familles Wehle, von Bilinski, Karl Abraham Wetzlar von Plankenstern, Wertheimer, Zacher von Sonnenstein, von Adelsbach, Ferdinand Koreff, von Oppeln-Bronikowski
Liste des familles répertoriées comme juives à Prague à la fin du XVIIIe s. 
Liste des communautés juives de Bohème et Moravie à la fin du XVIIIe s.  

(ajouté le 28/10/2018) :
[17c] Fritz Backhaus, Mayer Amschel Rothschild: Ein biografische Porträt (2012) ; voir aussi le banquier Simon Moritz von Bethmann qui est mentionné par Kraushar, Jacob Frank et les Frankistes, vol.2, pp. 222, comme intermédiaire financier, tel que l'a relevé P. Hillard, Atlas du Mondialisme.
  
[18] "La main qui donne est au-dessus de celle qui reçoit." (Dicton italien, cité par Bonaparte pendant la première campagne d'Italie pour souligner la dépendance pécuniaire du Directoire envers l'armée d'Italie qui lui procura des millions et des trésors, butin des pays conquis.) Source: Lucian S. Regenbogen, Napoléon a dit : aphorismes, citations et opinions, Paris: Les Belles lettres (1996).
" Having made peace with the whole world, Bonaparte set about his task of preparing himself and the French people for the return to the God-system. It was ordained by him that money should not be exported from France on any pretext whatever except with the consent of the Government, and that in no circumstances should loans be employed to meet current expenditure whether civil or military.
The object was to withhold from finance the power to embarrass the Government as it had embarrassed the Government of Louis XVI. 
When a Government, Bonaparte declared, is dependent for money upon bankers, they and not the leaders of that Government control the situation, since “the hand that gives is above the hand that takes” . He did not allow anyone to forget the shipments of gold to England organized by Barras at the expense of the army of Italy, and at a moment when France was denuded of metallic currency. “Money,” he declared, “has no motherland; financiers are without patriotism and without decency: their sole object is gain. " Source: Wilson, R. McNair, Monarchy or Money Power, London: Eyre and Spottiswoode (1933). Reprinted as God and the Goldsmiths, Hawthorne, Calif.: Omni Publications (1961).

[18b] Voir également Comte Egon Caesar Corti, The Rise of the House of Rothschild, 1770-1830, (1927), original publié en allemand en 2 tomes:  Das Haus Rothschild, Insel-Verlag, Leipzig, vol. 1: Der Aufstieg des Hauses Rothschild. 1770–1830(1927), vol. 2: Das Haus Rothschild in der Zeit seiner Blüte. 1830–1871, (1928) ; Puis on consultera International Banking 1870-1914, Eds. Rondo Cameron,V. I. Bovykin (1991)
[19]  « In 1806, Napoleon invaded Hesse in response to Wilhelm’s support for Prussia. The Landgrave went into exile in the Duchy of Holstein, but Rothschild was able to continue as his banker, investing funds in London [where one of his son has a bank]. He also profited from importing goods in circumvention of Napoleon’s continental blockade. As a result of these dealings, Mayer Amschel amassed a not inconsiderable fortune » ; source : site officiel de la famille Rothschild
[20] W.  Berdrow, Büch Berühmte Kaufleute – Männer von Tatkraft und Unternehmungsgeist in ihrem Lebensgange vorgestellt, Pp. 194 (1905)
[21] Voir par exemple V. Hugo, Melancholia in Les Contemplations (1856), ainsi que le dialogue suivant tiré d'un roman de Balzac :
La banque envisagée ainsi devient toute une politique, elle exige une tête puissante, et porte alors un homme bien trempé à se mettre au-dessus des lois de la probité dans lesquelles il se trouve à l'étroit.
– Tu as raison, mon fils, dit Blondet. Mais nous seuls, nous comprenons que c'est alors la guerre portée dans le monde de l'argent. Le banquier est un conquérant qui sacrifie des masses pour arriver à des résultats cachés; ses soldats sont les intérêts des particuliers, il a ses stratagèmes à combiner, ses embuscades à tendre, ses partisans à lancer, ses villes à prendre. La plupart de ces hommes sont si contigus à la politique, qu'ils finissent par s'en mêler, et leurs fortunes y succombent. [...] Dans chaque siècle, il se trouve un banquier de fortune colossale qui ne laisse ni fortune ni successeur. [...] La Banque est comme le Temps, elle dévore ses enfants. Pour pouvoir subsister, le banquier doit devenir noble, fonder une dynastie comme les prêteurs de Charles-Quint, les Fugger, créés princes de Babenhausen, et qui existent encore... dans l'almanach de Gotha.” – Honoré de Balzac, La Haute Banque. La maison Nucingen, Pp 17 (1838)
[22]  Pr. N. Ferguson, The House of Rothschild, Volume 1: Money’s Prophets, 1798–1848 (1999)

[22b] Voir le site officiel de la banque d'affaires Rothschild
[23]  Pr. N. Fergusson, The Ascent of Money, Pp. 88, (2008) ; Données historiques du PNB par la Banque d’Angleterre ; calculateur d’inflation de la livre sterling.
[24]  “This may come as a bit of a surprise, as you can browse through Forbes’ extensive rich list and not find a single mention of the name ‘Rothschild’ in their list of the 500 wealthiest people on Earth. This is because the Rothschild’s wealth has been distributed amongst hundreds of heirs throughout the years, and has therefore diluted each individual’s personal fortune. With this being said, it is estimated that the Rothschild Family as a whole still possess in the region of $350 billion USD in assets throughout the world. Bear in mind that this is a low estimation. Due to their great secrecy, the sheer amount of assets they hold, and the scale of their operations, it is difficult to estimate exactly how much the Rothschild Family are worth. Higher estimates have placed it in the region of $1 trillion USD, making them by far the wealthiest family on Earth.”; source: theRichest.com, 06/2014.
[25]  Avec un taux d’intérêt cumulé constant de 5 % par an (valeur faible pour une banque d’investissement, si on se rapporte à l’historique des taux d’intérêts de la Banque d’Angleterre), 1 livre donne 6517 livres au bout de 180 ans (calculatrice). Donc 370 millions donnent 2411 milliards de livres sterling.
[26]  Par exemple, ces avoirs peuvent-ils bénéficier du statut de la City qui est le plus opaque paradis fiscal du monde ?
[27]  Pr. Murray N. Rothbard, The origins of the Federal Reserve, The Quarterly Journal of Austrian Economics vol. 2, no. 3 (Fall 1999), Pp. 3–51
[28]  Source : Forbes
[29]  Lettre attribuée aux frères Rothschild et rédigée en 1863, citée par J. F. Rutherford in Vindication, Livre II, Chapitre 6, Pp. 172-173, (1932). Elle est également citée par W.A. Overholser dans A short review and analysis of the history of money in the United States, Progress Publishing Concern, Pp.46 (1936), et dans de nombreux autres ouvrages à partir de 1932 jusqu’à nos jours. Authentique ou pas, la reprise constante de cette citation au cours des décennies montre combien cette notion de l’influence de la City sur Wall Street et Washington est prégnante parmi les auteurs spécialisés dans ce domaine.
[30]  Source : Pr Caroll Quigley, Tragedy and Hope: A History of the World in Our Time (1966) ; ainsi que The Anglo-American Establishment: From Rhodes to Cliveden (1981) ; traduction en français Histoire secrète de l'oligarchie anglo-américaine, Ed. Retour aux sources (2015).
[31]  Sputnik News, 03/2016
[32]  Sa mère était déjà de la maison Saxe-Cobourg. Elle a eu une très forte influence sur l’éducation de sa fille, orpheline de son père. Citons également le mariage morganatique du prince Alexandre de Hesse, fils de Louis II, grand-duc de Hesse avec la comtesse Julia von Hauke, qui fut titrée comtesse de Battenberg, en contrepartie de l'exclusion de sa descendance de la ligne de succession du trône du Grand Duché de Hesse. La branche britannique changea le nom de Battenberg en Mountbatten (qui est la traduction littérale anglaise de l'allemand Battenberg) en 1914.
[33] Source: Pr. Guido G. Preparata, Conjuring Hitler: How Britain and America made Third Reich (2005) ; BBC, 03/2016 ; Paris Match, 07/2015
[34]  Voir l’article sur les révélations de Snowden sur Wikipedia
[35]  RT, 06/2015
[36]  Tax Research UK, 08/2015
[37]  True Publica.org.uk, 03/2016
[38]  Treasure Islands, 02/2016
[39]  Automatic Exchange Of Information ; source : OECD

[39b] Le site officiel de la banque d'affaire Rothschild précise que grâce à un réseau international de succursales la branche française survit à sa nationalisation en France en 1982.
[40]  Financial Times, 12/2015
[41]  Financial Times, 10/2015
[42]  The Guardian, 05/2015
[43]  Source : wikipedia
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2016/03/07

Tout va très bien Madame la Marquise

Dans la continuité de nos analyses publiées dans le GEAB numéros 100 (12/2015) et 101 (01/2016), voici un nouvel instantané de l'évolution de quelques indicateurs que nous avions mis en lumière. On consultera les numéros du GEAB pour de plus amples explications.

Total of China Foreign Exchange Reserves
source: tradingeconomics.com

Comparez 2015-2016 avec 2008-2009.
Saudi Arabia Central Bank balance sheet in SAR million; 
source: tradingeconomics.com

Négatif pour la première fois!
10Y JGB; source: Bloomberg

Y a t'il vraiment un pilote dans l'avion japonais?
30Y JGB; source: Bloomberg

EFSF 10Y; source: tradingeconomics.com

10Y suisse; source: Bloomberg

Et pendant ce temps: retour à la normale de l'économie Russe.
source: tradingeconomics.com




2016/02/13

Entre Tigre et Euphrate, là où tout a commencé


En note de l'article "Fin de partie : les BRICS jouent et gagnent" publié le 28 septembre 2015 j'écrivais comme anticipation : 
j'ai personnellement annoncé à mon entourage le 14 septembre que d'ici 5 mois (donc d'ici le 14 février 2016) "l'Etat Islamique" ne serait plus une menace pour les pays environnants. Il ne resterait que quelques petits groupes de combattants parias dispersés.
Le moment est donc venu de tirer quelques conclusions de cette anticipation.

D'aucuns iraient vite en besogne pour déclarer non vérifiée cette anticipation politique. Il est vrai qu'elle n'est pas complètement vérifiée aujourd'hui, mais c'est oublier qu'il s'agit bien d'une anticipation valide.

C'est le paradoxe de l'anticipation politique: quand elle est valide, elle appelle certains acteurs en position défavorable à prendre conscience qu'il faut complètement changer d'approche tactique ou stratégique. 

Rappelons tout d'abord qu'il y a 5 mois -c'est à dire avant l'intervention de Poutine à l'ONU- aucune analyse publiée n'avait établi un tel pronostic sur le retournement complet de la situation face à un "Etat Islamique" (IS/ISIL/ISIS/Daesh) dont les experts et media nous abreuvaient les avancées sur le terrain, et annonçaient chaque jour la chute imminente du Président Assad. 

Depuis notre anticipation, nous avons pu constater:
  • l'annonce de l'intervention militaire de la Russie, sous l'accord du Président Assad;
  • la formation d'une coalition Syrie-Russie-Iraq-Iran et son alliance avec les Kurdes;
  • une position de la France a mi-chemin entre cette coalition et celle dirigée par les USA;
  • une campagne de frappes aériennes par cette coalition qui a totalement surpris l'OTAN par son déclenchement et surtout par sa réussite (1, 2, 3, 4, 5, 6, 7). La tentative de stratégie des USA pour affaiblir la riposte de la Russie est restée totalement inopérante;
  • un gain territorial par les troupes gouvernementales déjà très conséquent, au point qu'aujourd'hui Assad est confiant de pouvoir récupérer le contrôle de tout son territoire;
  • une rupture de la chaîne logistique entre Al-Quaïda -province de Idlib-, ISIS (à l'est d'Aleppo), et la Turquie (à la frontière nord) grâce à la jonction Aleppo-Nubl-Kurdes d'Afrin, qui condamne les djihadistes d'Idlib à court terme;
  • un contrôle raffermi de la poreuse frontière jordanienne avec la prise de Daraa, et de la frontière turque avec la prise de la région montagneuse à l'arrière de Latakia;
  • la reprise de Homs, d'Aleppo (en majeure partie - la poche se referme sur Anadan et Hreytan), d'Al-Salamiyah et d'autres villes stratégiques;
  • l'avancée en tenaille des Kurdes au nord vers Manbij (ils viennent de prendre Jubb al Kalb aş Şaghīr) et vers A'zaz, après celle en Irak où ils ont regagné le Sinjar. Les Kurdes sont à 10 km de Mosul;
  • la pression continue à Deir-ez-Zur, qui menace de couper complètement la principale route logistique pour ISIS entre Raqqah et l'Irak si l'armée d'Assad franchit le fleuve;
  • et enfin l'offensive en cours vers Al-Tabqah, à seulement 50 km de Raqqah en Syrie... en attendant celle des Kurdes, des Irakiens et des USA sur Mosul en Irak. 
Raqqah sur l'Euphrate, et Mosul sur le Tigre. Là où tout a commencé. Là où tout doit finir.


Cette déroute lors de la guerre-proxy menée et financée par la Turquie et l'Arabie Saoudite (au premier chef) les a obligé à faire brutalement tomber leur masque et à durcir leur politique étrangère vis-à-vis de leurs alliés occidentaux. Mais ceux-ci ont beau jeu de réagir mollement, pensant qu'il est urgent d'attendre, et de courber le dos, à défaut de soutenir pleinement Assad. Le départ de Fabius est à ce titre de très bon augure pour un renouveau de l'engagement diplomatique de la France. 

Décontenancés, la Turquie et l'Arabie Saoudite tentent une nouvelle provocation : une invasion conjointe de la Syrie par leurs armées. Des jets saoudiens viennent d'arriver en Turquie. Les systèmes de défense russe S-400 et S-500 n'auraient aucun mal à stopper leurs attaques. Cependant on peut penser à une provocation où une formation serrée de jets saoudiens mêlés à des jets turcs seraient envoyés pour être descendus en territoire Syrien. La Turquie irait immédiatement crier à l'agression dans les couloirs de l'OTAN avec l'article 5 en fouettant les membres de l'Alliance -les USA en particulier- pour qu'ils respectent leur engagement d'intervention, en clamant que les jets étaient intervenus dans le cadre de l'alliance anti-Daesh pilotée par les USA. Cela aura beau être complètement faux, les medias occidentaux amplifieront sans réfléchir ces dires pour ajouter à la pression sur les politiques. 

Comme nous l'avons déjà écrit: l'OTAN est désormais une coquille vide, une alliance délitée et chaque tentative de ranimer la flamme ne fera qu'afficher davantage au grand jour ses failles internes.